Antoine Catel raconte l’amour sincère, fusionnel, presque absolu, qu’il porte depuis toujours à la petite dernière d’une fratrie de quatre, disparue dans la blancheur immaculée de la cocaïne alors qu'elle avait à peine 23 ans. Une autofiction cathartique, une thérapie littéraire sauvée du marasme complaisant par une écriture poétique. Je ne sais pas si la poésie sauvera le monde comme le prédit Jean-Pierre Siméon, mais elle sauve au moins ce livre-ci.
Petites choses est un texte hybride : récit de voyage et d’expérience ; enquête sociologique et politique ; biographie. Une manière éclectique de faire littérature – à défaut de faire roman – qui ne m'a que partiellement convaincue. Quelle est la valeur ajoutée par la contribution de Benoît Coquil par rapport aux écrits, nombreux, l’ayant précédée sur le sujet depuis plus d'un demi-siècle ?
Mon petit est un écrit cathartique – encore un – dans lequel Nadège Érika se dissèque pour mieux se recomposer après un drame vécu. Un écrit moins intéressant pour le lecteur que pour celle qui écrit, s’y découvre et s’y (re)construit.
Que je suis fatiguée du règne de Narcisse, de ces textes qui répugnent à dire ce qu’ils sont vraiment et ne s’assument pas. Faut-il en passer fatalement par là pour gagner un statut littéraire en 2024 ? Entre lassitude et exaspération.
Le Je qui écrit ici est-il une autre ? Annoncé — trompeusement ? — comme roman en première de couverture, Déchirer le grand manteau noir d'Aline Caudet a tout des codes de l’autobiographie, sans s'en réclamer. Cet écrit cathartique fait œuvre de résistance intérieure pour les traumatismes vécus. Bien trop maladroitement.
Oubliée la Provence de Pagnol et de Giono ! Oubliés le bleu têtu du ciel lavé par le Mistral, le chant lancinant des cigales, les senteurs de la lavande et des figuiers, des herbes de la garrigue, le temple sombre et silencieux des oliviers, le murmure frais des fontaines et le tranchant des crêtes des Alpilles palpitant dans l’épaisseur de l’air chaud. Ce qui macère dans Les Vallées closes de Mickaël Brun-Arnaud est laid et gratuitement vulgaire. Vite de l'air frais ! Vite de la lumière !
2030. 6 ans auparavant, un drame a eu lieu, éloignant Thomas de Zoé. Leur monde a changé ; le nôtre aussi. Isabelle Amonou a placé son roman à peine quelques années au-devant de notre temps. Cette anticipation infime évite les pièges de la dystopie traditionnelle. Confier la narration à une 3e personne non omnisciente entretient la tension sans faiblir contribuant au plaisir pris à la lecture de ce roman dur et dérangeant, désenchanté, parfaitement maîtrisé tant dans le fond que la forme.
D’après une histoire vraie. Le Gardien de Téhéran retrace la vie d'un homme ordinaire au destin extraordinaire dans un pays à l’histoire récente tumultueuse. Ce roman fort bien documenté couvre 5 décennies et tisse l’histoire singulière d’un homme modeste, discret et peu cultivé à celle d’un musée et à celle, plus large, d’un pays dont Stéphanie Perez restitue toute la complexité. À lire avec l'actualité iranienne en tête.
Un premier roman tout en retenue certes, mais profondément dérangeant sur un deuil impossible et la difficile bien qu’absolue nécessité d’être à l’écoute de la personne que l’on accompagne dans sa fin de vie. Un huis-clos mère-fille inquiétant, une mère possessive, une fille mutique, avant une fin apaisée.
Roman d’une époque qui déshumanise les siens, le premier roman de Mathieu Lauverjat est un roman noir, vide d’espoir qui interroge la place de l’homme pris dans les tentacules d’une société en pleine transformation. Sur le papier cela s’annonce captivant, mais le résultat, dans sa forme, est fastidieux. Il m’a manqué la subtilité du propos — juste, au demeurant — pour adhérer pleinement à Client mystère dont le sujet est sapé par une forme indigente. Une déception.
Les Guerres précieuses est un roman en état de grâce, le premier d’une toute jeune autrice dont j’admire l'acuité du propos et l’élégance de l’écriture habiles à nous transporter, en peu de pages, des possibles de l’enfance aux renoncements de la vieillesse, de la douce fraîcheur d’une pluie d’été à la froideur d’une grande Maison recroquevillée sur un temps perdu. Intensément émouvant. Une merveille.